Khao Sok, c’est la promesse de jungle luxuriante, de nature brute et d’authenticité… une promesse tenue à moitié. On séjourne au Phu Siab Mhok, un hôtel perché dans la végétation, avec des chambres ouvertes sur la forêt et des bains en plein air, une belle idée sur le papier. Le lieu a du charme et l’accueil est familial — le fils, ultra bavard, raconte tout : les éléphants sauvages qui passent parfois, la rafflésie géante qu’on ne peut plus voir cette année car des touristes l’ont abîmée, les araignées à l’entrée qu’il considère comme ses copines. On fait un petit sentier juste en face de l’hôtel, moins de deux heures de marche, agréable et calme, bien plus plaisant à nos yeux que les sentiers du parc officiel, surpeuplés et sans grand intérêt. Mais même ici, tout semble un peu fatigué, usé, et quand on traverse le “village” à l’entrée du parc, on tombe surtout sur une enfilade de restaurants et d’agences à touristes. Heureusement, on mange un excellent Panang Curry chez Tiger — c’est déjà ça.

On tente ensuite d’aller voir le fameux lac de Cheow Lan, mais l’organisation est opaque et frustrante : impossible de discuter directement avec les bateliers au Cheow Lan Pier sans d’abord payer les frais d’entrée du parc (environ 400 THB par personne), puis les droits du quai, puis négocier un bateau — tous à peu près au même tarif (autour de 1800 THB), tous allant au même endroit, les trois rochers posés dans l’eau que l’on retrouve sur toutes les photos. On sent clairement que tout est verrouillé, les prix sont alignés, il n’y a plus d’espace pour sortir du cadre. Même un guide local rencontré à Khao Sok Sunlight, un ancien du coin devenu lucide sur le système, nous le confirme : ici, les prestataires se surveillent, ajustent leurs prix entre eux, et proposent des tours sans surprise, sans recherche, juste pour cocher les cases. En cherchant à contourner un peu les circuits classiques, on tombe par hasard sur un lieu improbable au bord de la rivière : potager, tentes, hamac, bateaux en bambou… et un hôte stone mais bienveillant qui nous invite à nous poser. Pas vraiment notre style, mais sincère. En fin de compte, Khao Sok donne à voir ses deux extrêmes : un tourisme devenu machine, et quelques zones de liberté, isolées, qui résistent encore un peu.